La voiture électrique, watt else ?

Le premier prototype de voiture électrique date de 1830, pourtant elle ne s'est jamais véritablement imposée dans le paysage automobile. Certes, le marché de l'électrique progresse, mais il reste embryonnaire. En cause : le manque de bornes de recharge et l'autonomie limitée des véhicules. Même leurs performances environnementales sont mises à mal.

10/03/2014
5 minutes

Les ventes de véhicules électriques ont bondi en 2013, enregistrant une hausse 50 % par rapport à l'année précédente avec 8 779 immatriculations en France en 2013 (contre 5 663 en 2012)*. Mais ces véhicules comptent pour seulement 3,1 % du marché global des véhicules particuliers en France. Et les prévisions initiales semblent difficilement tenables. Renault tablait sur 10 % de part de marché à l'horizon 2020, lorsqu'il mise en 2007 sur le tout électrique et s'allie avec Nissan pour investir 4 milliards d'euros. Le plan d'action national du Ministère de l'écologie de 2010 affichait les mêmes projections : 450 000 véhicules électriques en circulation en 2015, puis 2 millions en 2020. Pour l'heure, on est loin du compte. Le parc roulant, électrique et hybride confondus, est estimé aujourd'hui à 200 000 véhicules, selon l'Avere (Association des Véhicules Electriques Routiers Européens).

PAS ASSEZ DE BORNES DE RECHARGE

Et le Président de l'association, Joseph Beretta, de détailler : “en majorité, les acheteurs restent les entreprises et les collectivités, l'offre étant jusqu'à présent essentiellement tournée vers eux. Mais avec l'arrivée de la Zoé de Renault et de modèles allemands, nous espérons que la clientèle évolue vers les particuliers”. Car les particuliers sont encore réticents. En cause, le manque de bornes de recharge. Même si les constructeurs développent de plus en plus des partenariats avec les enseignes de la grande distribution pour en installer sur leurs parkings, on ne dénombre dans l'Hexagone que 6 000 points de recharge, principalement des bornes mises en service pour les voitures électriques en libre-service (Autolib à Paris, Auto'trement à Strasbourg, Auto bleue à Nice…). Une directive de la commission européenne impose aux États membres de présenter un plan de couverture national. Et créer un réseau national de recharge est l'un des 34 plans de relance industrielle du ministère du redressement productif. L'objectif est de doubler le nombre d'infrastructures d'ici 2015, en confiant la gestion de ce réseau à un opérateur unique. Le tout est financé par une enveloppe de 50 millions d'euros, issue du Grand Emprunt et gérée par l'Ademe. Pour l'heure, seuls 11 millions d'euros ont été utilisés… Malgré ces subventions, les collectivités hésitent encore à se lancer dans une technologie qui peine à décoller. “C'est clairement un frein au développement du marché des véhicules électriques. Il faut que les clients voient ces infrastructures de recharge dans le paysage pour se laisser tenter par l'achat d'un véhicule électrique. Même si, toutes les études le montrent, les automobilistes rechargent presque exclusivement à leur travail ou à leur domicile, rarement sur la voie publique. Du coup, il est encore plus difficile de convaincre les collectivités de s'équiper en bornes qui ne seront pas ou très peu utilisées…”, explique Thibaut Moura, délégué général adjoint du Club des voitures écologiques. Partant de ce paradoxe, le Club a eu une idée : “plutôt que mettre dix bornes de recharge dans une collectivité, autant n'en mettre que cinq mais multiplier les panneaux, intensifier la signalétique autour, pour informer et surtout rassurer les automobilistes.” Le projet serait porté par une fondation d'entreprises.

L'IRRATIONNEL PAR ESSENCE

“Un tiers des Français sont électro-mobilisables”, selon l'enquête de l'Avere-France, réalisée en 2012. “Ils vivent plutôt en banlieue, voire en milieu rural et font moins de 60 km par jour. L'accès à la prise est plus facile que dans un immeuble où il faut l'aval de la copropriété”, précise Joseph Beretta. L'autonomie des véhicules électriques, 100 km en moyenne, ne plaide pas en leur faveur. “Pour les cas exceptionnels, les longs trajets, il suffit d'anticiper un peu”, argumente Joseph Beretta. À travers cette question, se révèlent “les ressorts de la décision d'achat d'un véhicule, irrationnels par essence”, selon Thibaut Moura. “Au lieu de l'acheter en fonction de l'usage majoritaire, par exemple quelques dizaines de kilomètres quotidiennement, on l'achète toujours pour l'usage le plus extrême, comme partir en vacances très loin sur des routes escarpées avec beaucoup de bagages. Cela fait 50 ans que l'on dit aux gens qu'on roule au moins 500 km avec un plein, c'est complexe aujourd'hui de leur demander d'investir beaucoup d'argent dans un véhicule qui ne fait pas tout.” Grâce au bonus écologique, dont le montant s'élève à 6 300 euros pour une voiture électrique, le prix d'achat de ces véhicules est comparable à celui des véhicules thermiques. Et à l'usage, l'électrique s'avère plus compétitif que le thermique avec un coût d'entretien en moyenne inférieur de 40 % et les coûts de carburants inférieurs de 70 % (2 euros pour 100 km). Ceci dit, l'élément le plus coûteux est la batterie, pouvant représenter jusqu'à 40 % du prix de la voiture. Et comme toute batterie, elle a une durée de vie limitée. “Pour nous, la solution c'est la location”, explique Vincent Frappreau, attaché de presse Renault véhicules électriques et innovation. “Renault reste propriétaire de la batterie, que le client loue contre 49 ou 79 euros par mois en fonction du nombre de km parcourus à l'année et de la durée d'engagement. En plus, il bénéficie d'une assistance en cas de panne.” Et Vincent Frappreau de se targuer d'un taux de satisfaction atteignant “98 % chez les conducteurs de Zoé”. La citadine électrique, qui vient de fêter son premier anniversaire, a déjà été écoulée à 5 500 exemplaires. La marque au losange va bientôt commercialiser un câble permettant aux utilisateurs de brancher leur Zoé chez eux, sur du 220 volts. Jusqu'à présent, il fallait installer une wallbox pour une recharge en 10 heures.
Mais Renault, qui avait concentré jusque-là ses efforts sur le 100 % électrique, s'intéresserait désormais à l'hybride rechargeable et devrait présenter une Twingo équipée de cette technologie lors du Mondial de l'auto de Genève. “C'est un ajustement de stratégie, voire un changement de cap un peu troublant”, s'étonne Thibaut Moura. “Mais l'hybride est le mariage du meilleur des deux mondes, cela va dans le sens de l'histoire, dans le sens de la mixité énergétique.” C'est le concept défendu par le Club des voitures écologiques et que prône le dernier rapport de l'OPECST (Offi ce Parlementaire d'Évaluation des Choix Scientifiques et Technologiques) sur les mobilités sereines et durables. “Le focus électrique est très puissant. Seulement, il ne faut pas mettre tous les œufs dans le même panier, mais favoriser une multiplicité de solutions pour une multiplicité d'usages (électrique, hybride, GPL, GNV, biocarburants…)”, résume Thibaut Moura.

UNE VOITURE PAS SI PROPRE

Un rapport de l'Ademe (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie), sorti fin 2013, vient nuancer les performances écologiques de la voiture électrique. À la sortie de l'usine, son écobilan est plus lourd que pour un modèle thermique. La fabrication de la batterie exige l'extraction polluante de composants toxiques (plomb, lithium, cadmium…).
Selon l'énergéticien et consultant Jean-Marc Jancovici** “à l'échelle mondiale, le véhicule électrique ne conduit pas à des gains significatifs en matière d'émissions de gaz à effet de serre. En Allemagne, rouler en voiture électrique, ne présente aucun intérêt du point de vue des émissions de CO2 : c'est simplement remplacer le pétrole par le charbon puisqu'Outre-Rhin l'électricité provient à 44 % des centrales thermiques. Idem pour la Chine, où l'électricité est produite à 80 % par le charbon. Pour que la voiture électrique ne soit pas contre-productive, il faut accepter le nucléaire. Faire rouler des voitures à l'énergie éolienne et photovoltaïque ne peut marcher que pour une poignée de happy few***”.

* Selon les chiffres de l'Avere.**www.manicore.com***Quelques heureux privilégiés, ndlr.

Actualités et conseils

Découvrir tous nos articles

Tempête de grêle chez mon garagiste : quelle indemnisation ?

J'ai déposé ma voiture chez mon garagiste pour une révision. Alors qu'il était sur le parc automobile du réparateur, il a été endommagé suite au passage d'une tempête de grêle. Qui va indemniser les dégâts de ma voiture ? 

Législation 24 avril 2024

Médicaments et conduite : prudence

Suivez le picto pour être sûr de pouvoir prendre le volant !

Législation 23 avril 2024

Sortie motos 68 : dimanche 14 avril 2024

Temps estival pour une promenade allant des vignobles Alsaciens aux vignobles Badois : un parcours de 200 km pour 9 équipages et 15 participants !

La vie de l'association 23 avril 2024