Le casse-tête des zones à faibles émissions

200 zones à faibles émissions existent à travers toute l'Europe. Des zones urbaines dans lesquelles le trafic est restreint pour lutter contre la pollution de l'air. Si le principe est le même sur tout le continent, les systèmes mis en place diffèrent d'une ville à l'autre : péages, vignettes, vidéosurveillance avec amende à la clé pour les contrevenants… Un casse-tête pour le touriste français. D'autant que la France, au lieu d'emboîter le pas de ses voisins, traîne les pieds pour mettre en place ces zones et s'expose, elle aussi, à une amende.

10/07/2014
5 minutes

Le retour est rarement le moment le plus agréable des vacances. Alors, quand un PV arrive dans la boîte aux lettres, là, c'est carrément plombant. Sur Internet, les forums recèlent de témoignages de touristes français, désemparés, racontant tous la même mésaventure. Certains ont même créé des blogs entièrement dédiés à la question. La plupart reviennent d'Italie, se sont égarés quelques instants au volant, dans le centre historique d'une ville, à Rome, Florence, Milan, Naples, Pise, Vérone, etc. Quelques semaines, voire quelques mois plus tard, ils ont reçu une amende d'un montant avoisinant les 100 euros. En cas de voiture de location, s'ajoutent des frais de recherche du conducteur. Pourtant, aucun ne s'est fait arrêter par la police sur place. Et le PV est, bien souvent, rédigé en italien. À n'y rien comprendre.

DES PV PAR MILLIERS

En fait, sans qu'ils s'en soient rendu compte, ils sont entrés dans une ZTL, une Zone à TraficLimité. Aucune barrière, aucun péage : un simple panneau blanc, carré, et arborant un cercle rouge l'indique. Cette zone est autorisée aux seuls riverains et à quelques professionnels qui ont un permis d'accès payant. Des caméras ou des bornes électroniques relèvent toutes les plaques minéralogiques pour les confronter à la base de données. Impossible donc de passer entre les mailles du filet : l'accès d'un véhicule non-autorisé est automatiquement enregistré, l'infraction transmise directement au contrevenant. Et le touriste recevra autant d'amendes que de passages devant ces bornes, même à quelques minutes d'intervalle… La facture grimpe vite quand on tourne en rond, perdu dans un dédale de rues inconnues. Sur les sites de voyages, ils sont nombreux à raconter que les autorités leur réclament 500, 700 euros. Rien qu'à Florence, selon les statistiques officielles de la ville, 40 000 contraventions de ce type ont été dressées en 2012.
L'Ambassade de France en Italie et les différents consulats sont submergés de courriers d'automobilistes français victimes de la réglementation italienne. Quels recours sont possibles ? Selon la loi italienne, l'automobiliste est tenu de payer seulement si le PV lui est notifié dans un délai de 360 jours, ce qui n'est pas toujours le cas. En effet, bien souvent, les touristes reçoivent non pas le PV, seul document valant obligation légale de paiement, mais un simple avis de paiement d'une société de recouvrement italienne ou française. Ceci dit, si le PV est effectivement reçu dans les temps, l'automobiliste a deux mois pour s'acquitter de la somme due, sans quoi elle peut doubler et des frais de notification viendront encore gonfler l'addition… Reste le recours auprès du juge de paix de la ville dans laquelle a été commise l'infraction. Il consiste en un courrier recommandé avec accusé de réception, rédigé en italien, dans lequel l'automobiliste fait preuve de sa bonne foi, invoque son ignorance de la signalétique, son hébergement dans le centre… Seulement, la procédure impose de se présenter ensuite au tribunal de la localité et se conclut rarement en faveur de l'automobiliste étranger. Seuls les vices de forme ont une chance d'aboutir.

SUÈDE : 40 % D'ÉMISSIONS DE PARTICULES EN MOINS

Si l'opération s'avère fort lucrative pour les collectivités italiennes - qui souffrent par ailleurs d'une baisse des dotations de l'État depuis la crise - les bénéfices attendus portent avant tout sur la qualité de l'air et la qualité de vie. Il s'agit de réduire le trafic dans les centres-villes pollués et congestionnés. Outre l'Italie, dix autres pays européens ont adopté des mesures pour restreindre l'accès au cœur des villes.
En tout, en Europe, 200 villes ont instauré des zones interdites aux véhicules les plus polluants, des “Low Emission Zones” (LEZ), zones à faibles émissions pour se conformer aux valeurs limites mentionnées dans la directive européenne sur la qualité de l'air de 2008. La Suède a été la première à expérimenter le dispositif en 1996 et enregistrerait une réduction de 40 % des émissions de particules et de 10 % pour le dioxyde d'azote. “Ce n'est pas la solution à tous les problèmes mais c'est une action nécessaire pour améliorer efficacement la qualité de l'air. Pour les particules, il faut non seulement agir sur le transport routier mais aussi sur le chauffage, l'industrie”, explique Gilles Aymoz, chef du service de la qualité de l'air à l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie).

L'IMPOSSIBLE HARMONISATION EUROPÉENNE

Londres a adopté un système de péage urbain qui poursuit les mêmes objectifs, dès 2003. L'Allemagne, elle, a opté pour des vignettes. L'entrée dans l'aire concernée est signalée par un panneau mais les contrôles, là, sont manuels (deux fois moins coûteux que la vidéosurveillance mais générant dix fois moins de revenus*) et l'amende s'élève à 40 euros (80 euros depuis le 1er mai 2014, NDLR). Selon la ville, les heures, la circulation est autorisée en fonction de la couleur de l'éco-pastille attribuée aux véhicules plus ou moins polluants : verte, jaune ou rouge. “Pour réussir, la mesure doit être progressive, afin que la collectivité puisse mettre en place des solutions de substitution permettant le transport des personnes et des marchandises. Puis il faut accompagner les usagers, faire preuve de pédagogie, les aider à analyser leurs besoins et à changer de véhicule le cas échéant”, plaide Gilles Aymoz.
L'étendue des LEZ diffère également. En Europe, elles vont de 2 km² pour de petites villes allemandes à 1 500 km² pour le Grand Londres. Dans certains pays, seuls les camions et autocars sont concernés, dans d'autres, comme l'Italie, tous les véhicules, y compris les deux roues, sont sujets aux restrictions. Quid de l'harmonisation au niveau européen ? “C'est à la collectivité, à l'agglomération de se saisir du problème et d'inventer le système qui correspond le mieux au contexte local, au territoire, aux enjeux économiques et surtout à sa flotte de véhicules. On pourrait imaginer un système européen, unique, parfait, mais le plaquer sur n'importe quelle ville est voué à l'échec”, répond Gilles Aymoz qui préconise un périmètre suffisamment vaste pour “éviter les stratégies de contournement” et inclure un maximum d'habitants. Car il s'agit surtout d'un enjeu de santé publique. Cette pollution pernicieuse serait responsable de 348 000 décès prématurés par an en Europe chez les plus de 30 ans, selon le programme Air pur pour l'Europe mené par la Commission européenne de 2001 à 2006.

UN SYSTÈME “SOCIALEMENT INJUSTE” : LA FRANCE S'INTERROGE

Dans l'Hexagone la loi Grenelle II avait bel et bien prévu des ZAPA, des “Zones d'Action Prioritaire pour l'Air”, autrement dit, des LEZ à la française. Sept agglomérations s'étaient portées candidates pour une expérimentation. En 2012, Delphine Batho, Ministre de l'Écologie, expliquait que le dispositif s'avérait “trop rigide et socialement injuste”. Car, les ZAPA, comme les LEZ, ciblent les vieux véhicules et les diesels. Ainsi, les premiers pénalisés risquaient d'être les ménages en banlieue, aux revenus trop faibles pour acquérir une voiture neuve, une occasion très récente ou un véhicule électrique. L'Ademe a donc lancé une vaste étude de faisabilité qui sera rendue publique d'ici deux mois. Dernière idée en date : utiliser les certificats d'assurances déjà présents sur les pare-brises mais en leur donnant une couleur différente selon la norme d'émission du véhicule. À suivre…

(*) Selon le rapport de l'Ademe, mai 2012, sur les LEZ à travers l'Europe.

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